Les médias nous expliquent que l'Euroscepticisme ne cesse d’augmenter, et nous annoncent que le FN, souverainiste et isolationniste, sera majoritaire aux prochaines élections.
Alors que nous apporte l'UE et que nous coûte-t-elle ?
Je ne reviendrai pas ici sur la paix qui n'a jamais duré aussi longtemps sur notre continent. Pourtant les jeunes générations feraient bien d'y réfléchir : l'histoire regorge d'écroulements plus ou moins violents de constructions politiques bien plus installées dans l'espace et dans l'histoire que ne l'est notre union actuelle.
Oublions les fantasmes Français de "Grande Nation" que nos concitoyens Européens moquent plus ou moins gentiment. La mutualisation des dépenses de défense sera un long chantier, tant qu’il n’y aura pas une DGA fédéralisée capable de concevoir et de faire construire des équipements communs aux différentes armées nationales, ce qui suppose probablement un état major européen intégré au sein de l'OTAN.
Concentrons nous donc sur l'ambition initiale : le "Grand Marché" dont l’intérêt doit être apprécié dans le cadre global de l'économie mondialisée et de la situation géopolitique globale.
Dans sa forme actuelle, encore bien imparfaite, il nous apporte des taux d’intérêts bas et des coûts de matières premières maîtrisés. Notre pouvoir d'achat repose encore très largement sur ces deux atouts, même si notre classe politique a gaspillé ces avantages par aveuglement idéologique ou clientélisme à courte vue depuis plus de trente ans. Que ceux qui prônent la sortie de l'Euro réfléchissent trente secondes à ce que deviendrait alors l'impact de ces deux postes sur notre économie, et à la crise sociale inévitable. Mais peut-être sans l'avouer souhaitent-ils cette crise pour faire émerger le monde nouveau dont rêvent tous les extrémistes.
La mondialisation des échanges a apporté un enrichissement sans précédent à une bonne moitié du genre humain. ou plus exactement elle a permis à des peuples comme la chine et l'Inde de retrouver dans l'économie mondiale la part dont l'Europe du dix-neuvième siècle les avait privés. Ce sont des concurrents, mais aussi des débouchés commerciaux.
La France dispose encore, pour peu de temps si rien ne change, de tous les atouts permettant d'exceller sur ces marchés, comme le démontrent tous les jours les succès d'entreprises d'origine Française ou de citoyens français dans des entreprises multinationales. Seuls, les membres de notre classe administrative et politique, ce sont malheureusement souvent les mêmes, ne connaissent que l’hexagone comme horizon. Et c'est cette prétention que la politique locale peut tout, qui empêche la collectivité de prendre acte des contraintes en se consacrant aux domaines où l'action collective et politique peut être encore efficace.
Une des réalités incontournables et constamment niée, c'est les effets de la concurrence mondiale sur ceux qui ne sont pas leaders dans leur domaine. Comme disent les anglo-saxons "Winner takes all" le gagnant ramasse la totalité de la mise. Les conséquences en part de marché sont sans commune mesure avec le différentiel de compétitivité.
Et en termes de compétitivité, l’accès à un marché domestique de grande taille permettant d'amortir les frais d'études et développement de produits de classe mondiale, sans investissements supplémentaires pour attaquer les marchés internationaux, constitue un avantage concurrentiel considérable, dont les USA, la Chine et bientôt l’Inde usent et abusent.
Dans la seconde moitié du vingtième siècle cet avantage a été très consciemment exploité par les USA pour conforter la suprématie de leur économie. Dans les années 80, les start-ups d'origine européenne ou même françaises de la nouvelle économie étaient crées aux USA, puis attaquaient le marché Européen comme un marché d'exportation.
Dans beaucoup de domaines, cet avantage est en train de passer aux chinois, qui représentent le principal marché pour des biens intermédiaires, des produits de luxe et bientôt pour des biens des biens de consommation, des biens technologiques et même des réacteurs nucléaires. Grand bien leur fasse direz vous, cela ne nous concerne pas. Mais croyez vous que'un industriel ne va pas adapter ses produits aux desiderata chinois qui représentent le gros de son marché potentiel ? Et où vont se créer les nouveaux bureaux d'études ? Et dans vingt ans où seront les centres de décision si cette société a survécu ?
Croyez vous que les investissements chinois dans PSA aient pour but de créer des emplois en France ? Bien sur que non. Ils ont achèté l’accès à un savoir faire de classe internationale, qui leur faisait encore défaut et leur a permis de développer leurs propres entreprises. Heureusement la fusion Fiat/Chrisler va rééquilibrer l’ensemble.
Pourtant l'Union Européenne représente encore le plus grand marché de la planète. Mais nos entreprises n'en tirent encore que des avantages limités dans l’industrie et aucun dans les services. En grande partie à cause du retour à un fonctionnement inter-étatique dont même les allemands se satisfont désormais, mais aussi des stratégies des grands groupes financiers dominés par les anglo-saxons, qui prendront acte de l'émergence d'un marché réellement intégré si il advient un jour mais qui en attendant feront tout leur possible pour exploiter nos divisions à leur profit.
Alors arrêtons de rêver.
- Au niveau national, regardons la réalité en face et acceptons la concurrence mondiale à laquelle nous n'avons de toute manière pas les moyens d'échapper, identifions nos atouts et tirons en tous les avantages possibles.
- Au niveau Européen, mettons nous résolument au service de l'intégration du marché et apportons nos billes pour contribuer grâce à ce grand marché à la consolidation ou à l'émergence de leaders mondiaux, en veillant à nos intérêts et à notre attractivité en terme d'implantations et sans renoncer à la distribution géographique, des sites de production, de recherche et de décision. Pas de protectionnisme mais pas de naïveté non plus : la règle incontournable doit être la réciprocité de l’accès aux marchés vis à vis des Chinois, des Russes ou des Brésiliens comme des Américains ou des Indiens. Acceptons tous les abandons de souveraineté nécessaires à ces objectifs, mais ceux là seulement!
Et foin pour l'instant de la "France en Grand"
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