La retraite par répartition a été mise en place après la guerre.
Dans une société où les actifs étaient encore beaucoup plus nombreux que les retraités et où la durée de vie était courte, cette merveilleuse idée a permis, grâce à la solidarité inter-générationnelle, de mettre en place un système de retraite quasi universel.
Mais les choses ont changé : le ratio actifs/inactifs s'est détérioré et continue de se détériorer, et la durée de vie continue de s'allonger. La solidarité devient un fardeau sans cesse croissant pour les actifs : l'esclavage des actifs !
Nous sommes dans une situation baroque, où les heures travaillées sur une vie représentent moins de 10% des heures "vécues" mais où sous prétexte d'une liberté fantasmée, les actifs s'opposent à tout allongement du nombre d'heures travaillées, alors que la retraite n'est bien souvent qu'une désocialisation et une mise à l'écart dans la solitude. Le revenu moyen des retraités est supérieur à celui des actifs, qui pourtant financent ces retraites. Pourtant, considérant à juste titre qu'ils ont cotisé toute leur vie et "acquis des droits", oubliant que ces droits ne sont qu'une créance sur les revenus de leurs enfants, les retraités s'opposent à toute tentative du gouvernement de rééquilibrer le système.
LA SOLIDARITÉ INTER-GÉNÉRATIONNELLE SE TRANSFORME INÉLUCTABLEMENT EN CONFLIT D'INTÉRÊT ENTRE GÉNÉRATIONS.
Ce conflit est intrinsèque au choix de la répartition et à la déformation de la pyramide des âges. La solution ne peut venir que de l'abandon de ce système.
Une autre sources de conflits d'intérêts réside dans la multiplicité des systèmes de retraite, conséquence de la multiplicité des statuts que la France affectionne. Le gouvernement Philippe étudie une réforme "systémique" unifiant les différents régimes dans un régime unique : un même montant de cotisations donne les même droits. Espérons que cette réforme ira au bout, qu'elle harmonisera les régimes privés et publics et qu'elle permettra une flexibilité de l'âge de départ, un départ précoce entrainant une retraite plus faible.
Mais une fois cette réforme en place, il faudra bien s'attaquer à "l'esclavage des actifs" et passer de notre régime par répartition à un régime par capitalisation, pour que les droits acquis ne soient plus une créance directe des inactifs sur les actifs mais une part de capital différentié, dont la rentabilité serait assurée par l'activité économique globale. En son temps, Michel Rocard avait envisagé que cette transition pourrait s'effectuer en apportant en contrepartie des "droits acquis" avant l'abandon de la répartition les actifs de l'état dans des activités économiques concurrentielles, essentiellement son portefeuille de participations et des activités monopolistiques non cotées mais rentables, comme les aéroports ou les autoroutes .
Je ne suis pas capable d'évaluer les ordres de grandeur. Il est probable que les actifs financiers publics les plus aisément mobilisables ne soient pas suffisants pour contre-balancer la totalité des droits acquis. Des ressources complémentaires, issues de la TVA par exemple, seraient probablement nécessaires. Mais si nous voulons réellement nous attaquer à la pacification de notre société, je pense qu'il y'a là un sujet à creuser.
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